La cinquantaine est une période de transition pour les hommes et les femmes. Comment manœuvrer dans cette zone de turbulence pour garder une sexualité épanouie après 50 ans ?
Entretien avec le docteur Sylvain Mimoun, gynécologue-andrologue, psychosomaticien et directeur du centre d’andrologie à l’hôpital Cochin. Il est le co-auteur de « Le sexe pour les nuls » aux éditions First qui donne enfin les réponses à toutes les questions qu’on se pose, quels que soient son orientation sexuelle et son âge.
La sexualité des hommes après 50 ans est toujours tabou. Que se passe-t-il physiologiquement et émotionnellement pour eux ?
Chaque cas est unique, on peut à 60 ans avoir une sexualité bien plus satisfaisante que d’autres à 40 ou 30 ans. Ces hommes sont partis de haut hormonalement. Ainsi, même si leur sexualité décline un peu, ils continuent de fonctionner intensément. Pour les autres, le déclin sexuel est plus rapide. L’envie n’est plus là. Les érections tiennent moins bien. Parfois un bilan hormonal s’impose pour savoir s’il ne s’agit pas d’andropause, c’est-à-dire d’une chute spectaculaire de la sécrétion d’hormones mâles. La testostérone étant l’hormone du désir, elle est indispensable pour maintenir un bon fonctionnement sexuel et génital. En consultation, il y a ceux qui constatent leurs transformations et se demandent comment y remédier. Et ceux qui estiment leur déclin comme normal parce qu’ils vieillissent. Du coup, ils ne font rien pour que cela change. Comme le corps humain ne comprend que la répétition, si ces hommes fonctionnent « répétitivement bien », ils fonctionneront de mieux en mieux. Par contre, s’ils fonctionnent mal ou de manière trop épisodique, ces hommes cesseront de bien fonctionner, voire de fonctionner tout court.
Que se passe-t-il pour nous, les femmes ?
À 51 ans en moyenne, les femmes sont ménopausées, parfois plus tôt, parfois plus tard, sans que cela soit anormal. La privation hormonale s’ajoute au vieillissement naturel. Le tout entraine des réactions en cascade, notamment au niveau du vagin.
À ce stade, les femmes ont deux options : soit elles considèrent que le temps n’est plus à la séduction et elles vont investir ailleurs, dans d’autres activités ; soit elles vont se sentir enfin libérées des contraintes d’autrefois, des enfants, des règles, de la peur d’être enceinte, etc. Généralement, celles qui ont eu une vie sexuelle régulière et épanouie préfèrent la seconde option. Là encore, plus le vagin fonctionne, mieux il fonctionnera.
La fonction crée l’organe ! Il arrive toutefois que certaines femmes découvrent l’orgasme sur le tard.
Après un divorce, la rencontre avec un autre homme va tout changer pour elles. Le nouvel amant caresse les « bonnes » zones érogènes, il sait les écouter et les émouvoir, elles se sentent à nouveau vibrer et vibrantes. Et quand ces femmes restent avec le même homme en couple, ce n’est pas lui qui change, mais elles, parce qu’elles s’autorisent enfin le lâcher-prise.
Peut-on encore vivre une bonne sexualité après 50 ans ?
Oui, mais il faut accepter qu’après 45 ans, il y a des modifications qu’on le veuille ou non. La société va de plus en plus vite mais pas la sexualité. Il faut changer le tempo et trouver une autre façon de danser ensemble. Ca tombe bien, c’est généralement une période où on a plus de temps pour soi et pour s’écouter. Accepter de danser sur un nouveau tempo.
Ça peut commencer par un travail sur soi.
C’est le moment idéal pour pratiquer un « égoïsme partagé ».
Une femme doit gérer comment elle doit avoir son plaisir à elle mais aussi penser à l’autre pour le partager. Je parle des femmes, parce que mon observation m’a montré que si la femme ne veut pas, le rapport n’a pas lieu.
Parler d’égoïsme n’est pas antinomique avec la notion de couple ?
Il s’agit d’un égoïsme partagé. On n’a pas l’habitude de s’occuper de soi, de s’écouter. On nous a appris que l’égoïsme c’est mal, or c’est ce qui peut nous apaiser pendant cette période. Il faut s’accepter, passer du temps avec soi, savoir ce que l’on veut, comment on le veut. Vous comprenez que pour cela il est nécessaire de se recentrer sur soi-même. Ce qui permettra aussi de ne pas rendre le rapport sexuel compliqué. En travaillant sur soi, on va explorer, découvrir et nourrir notre couple de ces nouveautés. C’est un apprentissage, qui ne se fait pas du jour au lendemain.
Mais c’est certainement le meilleur cadeau à faire à l’autre et à la relation commune.
Des conseils pour améliorer sa sexualité après 50 ans ?
Pour retrouver une sexualité épanouie, on peut agir au niveau émotionnel ET physiologique.
Une relation se passe bien que si les protagonistes sont détendus et se sentent bien en compagnie de l’autre. La complicité est vraiment un atout majeur pour que les choses se déroulent favorablement.
Si vous sentez que les scènes et les comportements se répètent, n’hésitez à consulter. Je vous conseille vraiment de ne pas laisser les choses s’installer. Mais plutôt chercher à retrouver l’envie et le besoin de se parler, dialoguer pour trouver une nouvelle harmonie. Une tierce personne peut vraiment faciliter ce dialogue.
J’insiste sur le plan émotionnel, parce qu’on en sous-estime vraiment l’impact. Surtout pour les hommes qui doivent comprendre qu’il y a une part émotionnelle dans leur érection. S’ils ne l’intègrent pas, ils resteront dans une certaine obscurité. Dans ma pratique quotidienne, j’utilise l’hypnose pour apprendre à gérer les émotions, reprendre confiance et retrouver une certaine sérénité.
Ce qui n’empêche pas aussi le recours à des médicaments comme par exemple, le Viagra. Le but, c’est d’arriver à être en phase avec sa/son partenaire. Je pense que la réussite de ce genre de traitement passe par la compréhension qu’il ne faut pas chercher une performance mais un véritable tremplin. C’est une béquille intéressante pour reprendre confiance.
En adoptant un nouvel état d’esprit : repensez les faiblesses comme des atouts !
Avec le temps qui passe, les hommes deviennent moins instinctifs et plus «émotionnels». C’est un vrai plus dans la relation sexuelle, ils privilégient davantage la qualité à la quantité ou la performance.
Tout est plus long (ou plus rapide) dans la relation sexuelle, l’excitation et les préliminaires, le maintien de l’excitation, l’éjaculation, la période réfractaire, la qualité de l’orgasme… Il faut donc soutenir davantage les stimulations sexuelles, ce qui oblige à travailler son cinéma érotique et à faire preuve d’imagination.
On se connaît mieux avec le temps. Son corps, son orgasme, ses faiblesses, ses forces, c’est familier. On peut donc se permettre d’exprimer plus facilement ses désirs, ses attentes, ses refus, ouvertement et sans complexe.
La routine des vieux amants a des qualités à ne pas sous-estimer. Elle sécurise et n’oblige pas à se remettre en question à chaque fois (ce qui est épuisant à la longue !). Elle s’appuie sur une solide connaissance de l’autre et s’accompagne de rituels apaisants (retrouvailles qui rythment et ponctuent le quotidien).
Pour en savoir plus sur le plaisir après 50 ans : https://www.konenki.fr/orgasme-apres-50-ans-avons-nous-autant-de-plaisir/
https://www.lisez.com/livre-grand-format/le-sexe-pour-les-nuls-grand-format/9782412058299