On parle variations hormonales, ménopause et découverte du cycle féminin avec Camille Pelloux, enseignante et responsable pédagogique à l’école professionnelle supérieure de Naturopathie de Lausanne. Elle aussi est l’auteure de « Nature Guérisseuse pour mon ventre ».
Avec des parents minéralogistes et globetrotters, la naturopathe a cultivé très jeune un lien étroit avec la terre, avec l’aventure, avec le contact humain et avec les savoirs anciens. Voyons comment cette expérience de vie unique et ces connaissances profondes se combinent avec nous, les femmes de plus de 45 ans.
Chemin de vie d’une passionnée…
De la naturopathie, vous êtes passée à une approche plus holistique…
Ma sensibilité a fait naître dès l’enfance des questionnements et des curiosités envers les médecines traditionnelles et une vision plus globale de l’Être humain. J’ai mis longtemps à comprendre ce que je pouvais faire de toute cette matière. J’ai commencé mon chemin d’exploration très jeune quand j’ai eu des problèmes de santé.
Mes soucis de santé m’ont permis de réaliser à quel point le corps somatise. Le début du processus est de se reconnecter à son corps – c’est-à-dire écouter ses besoins, se reposer, comprendre son rythme. C’est la première porte d’entrée. La naturopathie aide bien sûr mais c’était limité. Aujourd’hui, je travaille sur le plan psycho-émotionnel, le travail des profondeurs. J’utilise des remèdes comme l’hygiène de vie mais pas que, j’y incorpore aussi le travail sur l’énergie.
Quels sont les nouveaux chemins que vous avez empruntés ?
Depuis toujours je suis habitée par un monde, sensible aux messages sur des choses plus profondes de l’Être mais j’avais la trouille d’aller plus loin, de toucher au mystique, de m’aventurer hors des chemins tracés. Et puis, j’ai commencé à travailler en associant d’autres types de guérisons et de nettoyages de mémoires, enlever du corps des empreintes qui alourdissent notre liberté d’être, celles de nos mémoires psy généalogiques, celles héritées par notre culture, notre éducation. C’est ce qu’on appelle du nettoyage énergétique. Sur ce travail de guérison, j’ai été guidée par Churla Flores, une guérisseuse bolivienne, réfugiée politique, installée à Genève. J’ai aussi travaillé avec des guérisseurs mexicains. Le yoga et la méditation ont aussi été sur mon chemin. J’ai fait beaucoup de soins, des cures ayurvédiques où l’on fait du « nettoyage ».
C’est un voyage qui nous ouvre à devenir ce qu’on est et pas ce qu’on attend de nous.
Et puis les synchronicités de la vie ont fait que je suis retournée au Mexique plusieurs fois avant de décider de m’y installer la moitié de l’année. La conception chamanique y est ancrée dans le quotidien. J’habite dans cette ville magique Oaxaca, où se tient la fête des morts, une ville de guérisseurs, d’artisans, d’agriculteurs, un lieu où la mystique est très présente. Une ville d’artistes et de chamanes.
En quoi le rapport à l’âge et au féminin est-il différent au Mexique ?
Au Mexique, la femme a une place toute particulière. Le corps de la femme, le rapport au corps est bien plus décomplexé.
Ici, on dit qu’avec l’âge on gagne en savoir. On porte en nous des savoirs ancestraux, au cœur de nos cellules, nous avons tous une possibilité de reconnexion avec une forme de sagesse.
Plus on se rappelle, plus on devient complet. On doit passer d’une compréhension intellectuelle à plus de connexion avec les sens. Ça paraît dingue en occident. Mais, ici, on accorde beaucoup d’importance au fascinantes « abuelas » – les grands-mères. Dans les sociétés occidentales, après 45 ans, une femme est considérée comme périmée.
Ici, elle est respectée, c’est la gardienne du savoir, la passeuse de lumière, l’enseignante et la guérisseuse de la communauté.
Faudrait-il permettre aux femmes de se reconnecter au cycle féminin ?
Oui, c’est ce qu’évoque la psychanalyste Jungienne et Curandera, Clarissa Pinkola Estés dans son livre « La femme qui court avec les loups » : retrouver les vertus de la nature sauvage. Il faut comprendre « sauvage » dans le sens de « naturel », en accord avec les rythmes biologiques et aspirations authentiques, une possibilité de se reconnecter à l’énergie puissante et créatrice du féminin. Cette auteure a aussi écrit un livre appelé « La Danse des grands-mères », fascinant hommage aux femmes.
Est-ce important de se reconnecter à ses cycles, même quand on arrive au bout de ses règles, en préménopause ou ménopause ?
Absolument. Miranda Gray (auteure de « Lune rouge : les forces du cycle féminin ») initie la femme moderne à sa nature cyclique. Plus nous sommes en accord avec nos cycles et l’énergie qui y correspond, plus nous sommes alignées et épanouies. A l’inverse, en essayant de résister, de contrôler, on peut créer de nombreuses tensions.
La préménopause et la ménopause sont aussi à prendre en compte dans un cycle plus grand.
Aidez-nous à comprendre le cycle féminin…
Reprenons les 4 phases du cycle de la femme.
La phase contemplative, dite de « la sorcière » (du 1er au 6ème jour des règles), un temps d’intériorisation. C’est le moment pour prendre soin de son corps, faire une pause. Pendant les règles, dans les sociétés traditionalistes, on isolait les femmes (tentes rouges) car on les savait hyper créatives à ce moment-là. Elles étaient toutes ensemble reliées à la lune et elles écrivaient, peignaient, donnaient à la communauté.
La phase dynamique (du 7e au 13e jour du cycle), dite de « la vierge » qui est un temps de productivité. C’est le moment d’agir, de se lancer dans des projets. Cela correspond à la fin de nos règles.
La phase expressive, dite de « la mère » (du 14e au 20e jour du cycle) : un temps relationnel, c’est l’ovulation. Nous sommes dans une démarche de connexion, de relationnel avec l’autre, séductrices et généreuses.
La phase créative, dite « de l’enchanteresse » (du 21e au 28e jour), idéale pour se libérer de son bagage émotionnel négatif, c’est la phase prémenstruelle. On va avoir des sautes d’humeur avant les règles, un accès unique à des émotions qu’on porte en nous, ça émerge. C’est notre porte vers l’intérieur. Le cycle menstruel est la source de puissantes énergies créatrices, spirituelles, sexuelles, émotionnelles, mentales et physiques.
Comment entrer dans ce cycle quand on est au stade de la ménopause et de la préménopause ?
Quand la femme rentre dans une autre période, cela fait partie d’un plus grand cycle qu’il faut prendre en compte. Ce n’est pas la fin quand les règles cessent mais une continuation. La nature de la femme est cyclique : les âges de la vie ont aussi symbolique et aptitude à rencontrer la vie. Si on appliquait ces règles, si on se reconnectait au féminin sacré, on pourrait comprendre que notre cycle énergétique suit notre cycle menstruel. La préménopause, c’est la transition similaire à celle prémenstruelle. C’est la phase de l’enchanteresse… Le moment de se comprendre, d’accepter ses émotions, de voir ce qu’il y a à réguler avant un moment de grande clarté et de possibilité d’action ! On a accès à ses émotions, c’est une phase riche en apprentissages sur nous-même…
Pour en savoir plus sur les symptômes de la préménopause https://www.konenki.fr/qu-est-ce-que-la-premenopause-les-signes-et-les-symptomes/
Quels remèdes en naturopathie pour calmer les symptômes, notamment le ventre qui gonfle ?
Il faut comprendre que les hormones sont des substances chimiques produites par les glandes de notre système endocrinien. Leur fonction : délivrer des messages sur son équilibre. Cela peut impacter la libido, le rythme cardiaque, la chaleur corporelle, le sommeil, la qualité de la peau, la forme du corps, etc… Les déséquilibres hormonaux se produisent lorsqu’il y a trop ou trop peu d’une des hormones. Justement durant la période de transition qu’est la préménopause, les baisses hormonales anarchiques entraînent de petits déséquilibres qui peuvent provoquer des effets secondaires importants.
Pour qu’un système hormonal marche bien, il y a des prérequis
Pour fabriquer les hormones, il faut de la matière première : ce sont les macro-nutriments (des protéines, des acides gras, des oligo éléments…). Par exemple, les hormones comme l’œstrogène ou la testostérone sont synthétisées à partir du cholestérol. Il faut aussi des micro-nutriments comme par exemple le zinc.
Bien se nourrir au quotidien, c’est la première des clefs.
Ensuite, pour vivre mieux ces variations, il faut aussi un foie qui fonctionne bien
Une hormone quand elle n’est pas utilisée, elle est détruite par le foie. Si on a un foie qui fonctionne mal, la destruction des anciennes hormones ne sera pas faite et on va stocker…
Il faut savoir qu’on a un stock d’œstrogènes dans la graisse des hanches. Si une femme a un peu ou même beaucoup de graisse autour des hanches, elle a un stock supplémentaire qui lui permet d’opérer une transition en douceur. Cependant, un excès d’œstrogènes peut aussi entraîner d’autres déséquilibres, c’est une question de juste milieux. Les œstrogènes permettent par exemple une plus grande synthèse de sérotonine, l’hormone du bonheur et une bonne densité osseuse.
En résumé, les femmes qui s’en sortent le mieux sont les femmes qui ont un système nerveux apaisé, celles qui acceptent la transition symbolique, celles qui ont un peu de graisse en stock, celles qui ont un foie qui fonctionne bien.
Comment juger l’état de notre foie ?
Si vous avez des nausées le matin, des maux de têtes, des colères refoulées, des croutes collées dans les yeux, langue ou haleine chargées et difficulté à digérer des aliments gras, ces signaux sont des alertes : vous avez sûrement un foie qui fonctionne mal ou au ralenti.
Comment utiliser les plantes pour éliminer et dégonfler ?
D’abord ne pas sous-estimer l’impact des perturbateurs endocriniens qui ont la même forme moléculaire que nos hormones et qui se posent à la place des récepteurs, venant perturber le système hormonal.
Ensuite, utiliser des plantes qui vont nous aider, par exemple, l’ortie en infusion, une plante que j’adore qui nettoie et reminéralise. En infusion, 8 à 12 gr par jour. Contre-indications : si prise d’anticoagulants, insuffisance rénale ou hémochromatose.
Pour soutenir l’action du foie, j’utilise le chardon-marie. C’est un vrai allié pour aider et régénérer le foie dans ses fonctions d’élimination. Il existe des contre-indications à l’utilisation comme les cas d’allergie aux astéracées, l’hypertension. La prise de chardon-marie n’est pas recommandée aux femmes qui allaitent et durant la grossesse.
L’achillée millefeuille
C’est une plante médicinale qui peut aussi aider le travail du foie, qui va réguler les saignements et qui va simuler une action progestérone (on dit « progestérone like »). Vous pouvez en acheter en tisanes ou des plantes entières. 1 à 2gr de plantes séchées pour 150 ml d’eau bouillante, 3 fois par jour en dehors des repas. On en trouve aussi partout dans l’herbe à la campagne.
Le gattilier agit comme une « progesterone like » et « dopamine like » pour lutter contre la fatigue…
Elle est idéale si les signes s’accompagnent de bouffées de chaleur et de sécheresse vaginale. Cette plante stimule la sécrétion de progestérone (inhibe les contractions de l’utérus) et diminue l’intensité du pic d’œstrogènes, anti-androgènes (réduit la testostérone) et agit pour la normalisation de la sécrétion hormonale. Contre-indication : lors de traitement endocrinien.
Pour éviter le gonflement du ventre et la rétention d’eau ?
Il faut savoir que la progestérone est une hormone qui agit sur la rétention d’eau. Donc quand on vit une baisse de progestérone, l’aldostérone, qui régule la rétention d’eau, est altérée, d’où la sensation d’être gonflée un peu partout.
Ce qui va aider la progestérone, va donc agir sur les gonflements.
L’alchemille est une mauvaise herbe qui pousse partout à la campagne
Elle est « progesterone like », elle vient assécher et drainer les liquides supplémentaires et permet de dégonfler. Bien pour les femmes en surpoids. Infusion : 5 à 10 gr. par litre d’eau, 3 tasses par jour.
La reine des prés est une plante aussi draineuse, anti inflammatoire
Elle permet d’atténuer les symptômes de gonflement, de douleurs et de nettoyer. Infusion : 5 à 10 gr. par litre d’eau, 3 tasses par jour.
Rajoutez aussi des rituels bien-être comme la sudation avec hammam, sauna et bains chauds. Le massage aussi est excellent pour sentir le corps, se reconnecter à lui.
Qu’est-ce que votre expérience et votre savoir vous ont livré sur l’acceptation et la réconciliation avec son corps ?
D’abord, il faut stopper ce rapport au corps désastreux pour la femme. L’idée de perfection est un combat perdu d’avance. Nos abuelas ici au Mexique sont souvent rondes et elles s’en foutent, elles incarnent l’amour, elles incarnent la terre. Les femmes fines incarnent la finesse d’esprit, l’acuité et la sagacité. Chaque corps porte sa médecine. Arrêtez de vouloir le dompter, on lui fait mal et on se fait mal aussi.
Je crois qu’on hérite du corps qui sert notre mission de vie.
Il faut être aligné avec sa mission de vie, le bien-être profond vient de ce qu’on est ! La forme a moins d’importance. C’est une connexion sensorielle qui est importante, un respect des besoins physiologiques et un rapport amoureux à soi-même.
Si vous êtes dans votre corps, vous avez accès à l’information… à l’intuition, à la sagesse. On prend alors des bonnes décisions. Il faut réapprivoiser le corps, « rentrer dans son arbre », un concept chamanique évoqué par Churla Flores !
Comment arriver à s’aligner sur sa mission de vie ?
J’étais très fine, très musclée puis j’ai eu des problèmes alimentaires, avec un rapport au corps difficile. Mon corps s’est transformé, certes moins mince, mais je me sens mieux dans mon corps. Je marche pour aller chercher mes plantes, pour aller au marché, je fais l’amour, je danse, pas besoin d’autre chose, je bouge instinctivement mais je n’ai plus envie de me contraindre. C’est devenu intuitif.
Quand on choisit la voie du cœur, on change, on s’aligne, on a des besoins différents. En ce qui concerne les hommes, on n’a plus envie des mêmes hommes, on arrête ce qui nous fait du mal, on va vers ceux qui voient le beau dans l’authentique et l’imparfait. Il faut comprendre que plus on est en contradiction avec cette énergie féminine, avec la dynamique de la vie, avec l’énergie réceptive, plus la transition sera difficile. Les femmes qui ont les plus gros symptômes sont celles qui n’acceptent pas le passage à un autre.
Tes recettes « doudou » qui font des miracles ?
Ma petite boisson réconfort et bien-être : trempez des noisettes et amandes 2 heures. Mixez avec de l’eau, cannelle et gingembre. Filtrez le mélange, ça vous donne un lait, vous ajoutez une datte et de la vanille, vous mixez à nouveau et vous dégustez !
Vous pouvez ajouter du cacao pour le tryptophane qui booste l’humeur. Une collation idéale à 17 h.
N’hésitez pas à garder ce qu’il reste dans le filtre pour une matière première à cookies ou pain.
J’adore aussi les bains avec des pétales de roses et même un peu de miel. Faites des bains, si vous n’avez pas de baignoire, faites des bains de pieds. C’est incroyable pour détendre le corps et faire sortir le feu excessif. Cela chasse l’énergie YANG et apporte la douceur et le réconfort.
Vers le site de Camille Pelloux https://www.camillepelloux.com