Entretien avec Catherine Lacrosnière, auteure du livre de recettes « Cuisine anti-inflammatoire gourmande », avec le chef Ruben Sarfati
Elle est médecin nutritionniste, il est chef. Le résultat de cette rencontre : 130 recettes qui préservent la santé et ouvrent les papilles…
Comment la cuisine anti-inflammatoire peut-elle soigner les inflammations chroniques ?
L’alimentation anti-inflammatoire est mon centre d’intérêt depuis plusieurs années. Après 3 ouvrages sur le sujet, j’ai décidé de mettre en scène des recettes « goûteuses » sur la base de ces aliments qui peuvent soigner.
L’inflammation chronique n’est pas visible à l’œil nu. Elle peut être « bruyante » (maladie de Crohn, arthrose, maladies inflammatoires du colon, endométriose) mais aussi « silencieuse » (obésité, cancer, Alzheimer, diabète). Cet état est dû en partie à une alimentation pro-inflammatoire. Une bonne alimentation peut aider à réguler cette inflammation excessive en association avec l’activité physique, la lutte contre le stress et le fait de retrouver un sommeil de qualité . Regardez comme la crise de la Covid a montré que ces inflammations chroniques (diabète, obésité) sont synonymes de comorbidité. L’alimentation anti-inflammatoire est une arme dans la lutte contre les risques de santé. Et puis, c’est excellent pour lutter contre le vieillissement et retrouver son poids de forme !
Peut-on kiffer en mangeant sainement ?
Ruben a amené toute sa dextérité et son art pour travailler les aliments et créer des recettes gourmandes sur la base de la cuisine anti-inflammatoire.
On voulait que nutrition ne rime pas avec restriction.
J’ai rencontré Ruben à un dîner où il avait concocté, entre autres, un dessert aérien incroyable à base de mûres blanches et de granola. Une tuerie ! Je me suis dit que si on associait aux préceptes de la cuisine anti-inflammatoire un talent comme celui de Ruben, on pourrait enfin allier santé et goût !
Il faut savoir que Ruben est un amoureux des bons produits, attentif à la cuisine verticale (maîtrisant le choix des produits de la ferme à l’assiette). Dans sa ferme, il cultive ses fruits et légumes. Ruben a même des poules. Ses valeurs s’inscrivent déjà dans celles de la cuisine anti-inflammatoire. Ça donne des recettes étonnantes et délicieuses et qui font du bien ! J’ai testé toutes les recettes, un bonheur (rires !).
Faire de la cuisine anti-inflammatoire et gourmande, c’est compliqué ?
Une vraie aventure collaborative ! On a beaucoup testé et essayé.
Se plier à la cuisine anti-inflammatoire a demandé une vraie adaptation pour Ruben. Il faut trouver les bons compromis pour arriver à respecter les préceptes et bien sûr garder le plaisir de la table !
Par exemple, prenons la cuisson – primordiale dans le régime anti-inflammatoire – qui répond à des règles bien précises. Toutes les recettes de Ruben dans ce livre respectent une cuisson à faible température, avec des temps de cuisson plus longs pour conserver les nutriments.
Dans l’ouvrage, j’ai classé les différents modes de cuisson selon leur intérêt (vert, orange et rouge). Les modes « verts » à privilégier sont la cuisson à la vapeur, l’étouffé, les papillotes.
Les « rouges » sont la friture, le barbecue qui favorisent la formation de molécules délétères pour la santé, les produits terminaux de la glycation. Mais, vous trouvez pour chaque mode de cuisson (wok, micro-ondes, four, poêle, autocuiseur…) des recommandations précises qui vous aideront à utiliser le plus sainement toutes les différentes cuissons.
On retrouve pas mal de protéines végétales dans les recettes...
Pour Ruben qui est amateur de viande, c’était un véritable ajustement. Dans l’alimentation anti-inflammatoire, la viande doit être un repas ponctuel et non quotidien.
Il faut savoir que consommer plus de 100 gr par jour de viande rouge est potentiellement cancérigène (+ 50 gr par jour pour la viande transformées). Il faut privilégier les viandes maigres, et les poissons mais pour ces derniers, la recommandation de l’ANSES est de 2 fois par semaine.
C’est pour cela que les protéines végétales sont primordiales : lentilles, pois chiches, etc…
Il ne faut pas sous-estimer, passé 45 ans, nos besoins en protéines. Les muscles soutiennent les os, fragilisés par un risque d’ostéopénie voire d’ostéoporose. C’est important !
Si on suit un régime flexitarien (semi-végétarien), on retrouve dans les protéines animales, les acides animés essentiels pour construire les protéines. Par contre, si on ne consomme pas de protéines animales, il faut penser associer les protéines végétales des céréales à celles des légumineuses pour avoir tous les acides aminés.
Le poisson bien sûr mais pas quotidiennement.
Dans vos recettes, vous utilisez toutes sortes d’huiles. L’huile d’olive n’est pas le graal ?
On peut tout utiliser, c’est bien de changer : huile de colza, noix, lin, chanvre, l’huile de coco… Les huiles amènent chacune des propriétés différentes. Elles sont sources d’acides gras essentiels, il faut les varier pour qu’elles apportent toutes leurs acides gras.
Évidemment, l’huile d’olive est un excellent choix. Elle procure des acides gras mono insaturés, qui agissent pour une meilleure prévention cardio-vasculaire et contient de l’oléocanthal, une molécule anti-inflammatoire. Elle est la pierre angulaire du régime méditerranéen.
Pour le sucre aussi, vous variez les plaisirs : coco, agave...
Oui, il faut faire attention au sucre de table consommé en excès mais le vrai danger réside dans les sucres cachés, dans les produits ultra-transformés (sirop de glucose, sirop de glucose-fructose, amidon modifié…).
Il faut s’habituer à cuisiner à la maison pour éviter les sucres cachés qui font beaucoup de dégâts (augmentation du risque de diabète, de surpoids….). Pas de panique ! Vous trouverez dans mes recettes un indicateur de difficulté. Franchement, les recettes à 1 ou 2 étoiles sont vraiment simples ! A vous de jouer, si moi je réussis, vous pouvez y arriver, croyez-moi (rires !).
Dans la cuisine anti-inflammatoire, la diversité d’ingrédients est-elle importante ?
Je crois au changement pour faire du bien à son corps, la diversité pour se cocooner. Chaque produit a son intérêt, ses propriétés, ses goûts…
Pareil pour les eaux, il faut les diversifier car certaines contiennent plus de calcium ou de magnésium. Les « laits » végétaux aussi qui peuvent être enrichis en vitamine D et/ou en calcium. N’hésitez pas à passer de l’un à l’autre. Soyez inventif et choisissez aussi des farines différentes : d’épeautre, de châtaignes, de quinoa… Vous les trouverez aussi dans nos recettes, ce qui permet aussi aux « sans gluten » de se régaler !
Passé 45 ans, on a le ventre qui gonfle, la digestion est plus difficile
Je vous conseille de découvrir le Kéfir riche en probiotiques qui rétablissent l’équilibre du microbiote. Vous pouvez aussi essayer les légumes fermentés. Ruben a concocté un Kéfir façon Chaï pour se faire du bien en prenant du plaisir. C’est très important d’avoir ces probiotiques naturels. Il faut bien comprendre que tout est relié. C’est incroyable les interconnexions que l’on est en train de découvrir. De plus en plus, nous, spécialistes de la nutrition, mettons le microbiote au centre de nos préoccupations.
Si vous deviez choisir 2 recettes issues de la cuisine anti-inflammatoire pour la tribu Konenki ?
La gourmande, c’est le golden curcuma latte – lait doré
Le mélange avec un peu de gras permet le passage du curcuma, antioxydant. Le lait de coco choisi par Ruben donne un résultat des plus gourmands (prenez du lait d’amande sans sucres ajoutés, si vous voulez surveiller votre poids et agir sur les douleurs inflammatoires).
La recette idéale pour la silhouette et variations hormonales !
L’omelette à la sauge hyper protéinée.
Ingrédients :
3 œufs entiers
8 blancs d’œufs
4 oignons nouveaux
2 cs d’huile de noisette
½ bouquet de sauge
2 cs de moutarde à l’ancienne
2 cs de vinaigre de noix
4 cs huile de noix
300 g de Mesclun
Sel, poivre du moulin
Pour 4 personnes : Difficulté *
Durée de préparation : 15 minutes
Temps de cuisson : 10 minutes
Fouetter les œufs entiers et les blancs d’œufs et assaisonner légèrement
Hacher finement les oignons nouveaux et la sauge
Faire cuire l’omelette sur feu moyen dans une poêle badigeonnée d’huile de noisette
Avant de la replier, ajouter les herbes hachées
Replier et terminer la cuisson
Pendant ce temps préparer la vinaigrette avec de la moutarde, vinaigre et huile de noix
Dresser et servir accompagnée de la salade avec la vinaigrette
(Vous pouvez vous passer des jaunes et n’utiliser que les blancs. Dans ce cas, il faudra ajouter de la muscade ou de l’ail. En effet, le jaune étant gras, il est vecteur de goût. Il faut donc compenser si on l’enlève !)
Retrouvez Catherine Lascrosnière https://www.drserfatylacrosniere-nutrition.com